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TEXTES D'AMÉLIE MURAT



POUR CELLE QUI S'EN VA


Va-t-en vers les blondes villes
Qui parmi les canaux bruns,
De leurs ponts, doublent les piles
Et font baiser aux embruns
Leur chatoyant collier d'îles.

Pars... je reste. Tout voyage
N'est qu'un livre sans attrait,
Où sur chaque vaine page
Mon regard ne chercherait
Qu'une seule... seule image!

Un visage est ma contrée
Ma vie habite une main,
Plage ou ciel, brise ou marée,
Temple ou mont, fleuve ou chemin:
Son seul geste en moi vous crée.

Sois heureuse avec les pierres,
Les feuillages et les flots;
J'explore entre ses paupières,
Deux mystérieux flots
Ceints d'ombres et de lumières...

Charme un peuple de colombes;
J'ai mon orbe dans ses pas.
Veille les couples des tombes;
Je crois mourir en ses bras,
Un linceul d'or sur les lombes.

Car le pouce et la seconde
Me suffisent quand je sens
Sous ma tempe où le sang gronde,
Mêmement gronder le sang
D'un seul cœur qui vaille au monde...


Extrait de Le sanglot d'Ève



TEXTES AMÉLIE MURAT